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Décoder les non-dits en comité de direction


Titre lead Magnet

Lever les zones d’ombre pour renforcer la clarté et la maturité collective (ou Décider sans dire : le vrai coût des non-dits)

Introduction

Dans un comité de direction, ce qui n’est pas dit pèse parfois plus que ce qui est formulé. Des silences trop longs, des tensions palpables, des sujets soigneusement évités — autant de signaux faibles qui contaminent la qualité des décisions et la dynamique collective.

Ces non-dits sont rarement anodins. Ils freinent la fluidité stratégique, distillent le doute dans les relations, et créent des angles morts collectifs. Mais le plus dangereux, c’est leur invisibilité : parce qu’on n’en parle pas, ils semblent ne pas exister — tout en modelant profondément les interactions et les arbitrages.

Décoder ces dynamiques invisibles ne relève pas d’un simple talent d’écoute ou d’intuition. C’est un acte de lucidité stratégique. C’est choisir de voir ce qui dérange, ce qui échappe, ce qui se joue en coulisses — non pas pour tout révéler, mais pour mieux naviguer ensemble. C’est aussi une compétence collective que l’on peut développer : avec méthode, tact, et engagement partagé.

1. Ce que recouvrent les non-dits en CoDir

Un sujet systématiquement reporté. Une décision déjà prise ailleurs, puis “validée” en séance. Un membre qui s’exprime peu, mais dont les apartés avec le DG sont fréquents. Un sujet stratégique évoqué sans jamais mentionner les impacts humains. Tous ces indices trahissent des non-dits.

Les non-dits ne sont pas uniquement des secrets ou des mensonges. Ce sont souvent des vérités partielles, des inconforts évités, des intuitions non formulées, des tensions non nommées, ou des loyautés implicites. Ils s’installent :
- par peur de générer du conflit,
- par réflexe de protection individuelle,
- par culture organisationnelle (certains sujets sont “hors champ”),
- ou par loyauté à des jeux de pouvoir silencieux.

Ce qui rend leur traitement difficile, c’est leur caractère en partie inconscient. Ce ne sont pas nécessairement des dissimulations volontaires — ce sont parfois des zones que l’on ne voit même plus. D’où l’utilité d’un miroir : un regard extérieur, ou simplement la fraîcheur d’un nouvel arrivant, capable de repérer ce que le collectif ne voit plus.

“Ce n’est pas qu’on cache, c’est qu’on ne regarde plus.”

Comme en arts martiaux, où l’on ne prend conscience d’un automatisme que grâce au retour d’un partenaire ou du sensei, le non-dit devient visible par l’altérité bienveillante : celle qui ne juge pas, mais qui interroge.

2. Pourquoi les non-dits fragilisent les décisions

Les non-dits n’empêchent pas nécessairement de décider. Mais ils déplacent la décision hors du champ explicite. Ce qui devait être posé collectivement se joue ailleurs, dans des silences consentis, des corridors d’influence ou des "entre nous" non assumés.

Résultat :
- la compréhension partagée est fragmentée,
- la cohérence des décisions est fragile,
- l’adhésion est souvent de façade.

Dans certains CoDir, la décision semble prise… mais ressurgit plus tard sous forme d’objection passive, d’inertie opérationnelle ou de déminage à huis clos. Ce n’est pas le contenu de la décision qui est en cause, mais la confiance dans le processus.

Et au-delà du risque, il y a un coût d’opportunité : ce qui n’est pas nommé peut être essentiel — une intuition stratégique, un risque ignoré, un talent sous-exploité.

3. Comment commencer à décoder les non-dits

Décoder, ce n’est pas interpréter à chaud. C’est observer, ressentir, questionner. Voici quelques signaux faibles à accueillir avec curiosité :

- Une agitation corporelle inhabituelle (jambe qui tressaute, soupir, regard fuyant) : cela peut signifier un désaccord intérieur, une tension retenue ou simplement de la fatigue. Ce qui compte, c’est d’y prêter attention sans projeter de conclusion hâtive.
- Un silence prolongé après une question : est-ce de l’hésitation, de la sidération, un désalignement ? Ou un retrait stratégique ?
- Une blague qui revient souvent : sous l’humour, un tabou. Exemple : “On sait bien que les RH ne décident jamais rien ici” peut être un rire nerveux… ou une lucarne vers une réalité à explorer.
- Des mots absents : quand les mots “émotion”, “client”, “éthique” ou “incertitude” ne sont jamais prononcés, ce n’est jamais neutre.
- Des sous-groupes invisibles : apartés réguliers, regards qui se cherchent ou s’évitent, validations tacites. Le langage non verbal est un terrain d’investigation précieux.

Décoder, c’est poser une parole simple, sans mise en accusation. Exemple : “J’ai l’impression qu’on tourne autour de ce sujet sans vraiment l’aborder. Est-ce qu’on prend un temps pour y aller plus franchement ?”

C’est cette parole “à côté” du processus qui, souvent, réaligne.

4. Exemples concrets de non-dits en CoDir

La peur du conflit : un verrou collectif
Un membre du comité pense qu’aborder un sujet sensible déclenchera une crise. Il évite donc de poser une question clé. Par mimétisme ou prudence, les autres font de même. On confond alors conflit et confrontation. Résultat : le sujet s’enlise, le collectif piétine, et la cohésion devient façade.

Le DG “soldat” au lieu de “stratège”
Certaines figures de leadership se veulent exemplaires par l’action. Un DG reste sur le terrain, proche des équipes, opérationnel à outrance. Mais son absence de distance empêche la prise de hauteur. Derrière cette posture ? Une crainte non dite d’être jugé “déconnecté”. Le collectif en paie le prix : personne n’ose alors penser long terme.

L’entraide entravée
Une équipe aspire à plus de coopération. Mais chacun attend que l’autre fasse le premier pas. Pourquoi ? Parce que dire “j’ai besoin d’aide” expose. Cette vulnérabilité non formulée devient un tabou. Or, sans exposition partagée, l’interdépendance reste théorique.

5. Responsabilité partagée : sortir de l’injonction au leader parfait

On attend trop du leader. Qu’il incarne, qu’il tienne, qu’il porte — sans fléchir, sans faille. Pourtant, l’exemplarité n’a de sens que si elle est co-définie :
- Que signifie “être exemplaire” ici ?
- Qu’est-ce qui fait autorité dans ce groupe ?
- Quelle cohérence entre nos discours et nos actes ?

Une posture efficace de leadership n’est pas celle qui maîtrise tout, mais celle qui autorise l’imperfection, crée du cadre, et ouvre l’espace.

Le leader ne peut pas, seul, porter la clarté. Il peut :
- initier des gestes structurants,
- maintenir un espace d’expression authentique,
- modéliser l’écoute et l’auto-examen.

Mais c’est le regard croisé du collectif qui construit une culture où la parole est possible, où le silence peut être entendu — et où l’ombre n’est pas synonyme de danger.

Transition

Comprendre les non-dits, c’est bien. En faire quelque chose, c’est mieux.
Observer, nommer, partager : ce sont déjà des actes forts. Mais tant que rien ne change dans les interactions ou les décisions, les non-dits gardent le pouvoir.

Quelques clés pour avancer

6. Transformer l’observation en action – Décoder avec la Fenêtre de Johari

La Fenêtre de Johari, outil bien connu du développement personnel, devient un puissant levier collectif quand elle est appliquée à l’analyse d’équipe. Elle permet de clarifier ce qui est dit, ce qui ne l’est pas, ce qui échappe au groupe ou ce qu’il préfère éviter.

Elle distingue quatre espaces :
- Zone ouverte (arène) : Ce que tous savent et reconnaissent. Base de la confiance et de l’efficacité.
- Zone aveugle : Ce que d’autres voient mais que le groupe ne perçoit pas. Appel à feedbacks, risques invisibles.
- Zone cachée : Ce que l’équipe sait mais ne dit pas. Lieu des tabous et des tensions.
- Zone inconnue : Ce que personne ne sait encore. Potentiel inexploité, incertitudes à explorer.

Un CoDir peut l’utiliser en atelier :
- Identifier les zones ouvertes : que partage-t-on ? Que reconnaît-on ensemble ?
- Faire émerger les angles morts : que disent nos partenaires que nous ignorons ?
- Réduire la zone cachée : oser poser les tensions et les doutes.
- Explorer l’inconnu : se donner des espaces d’expérimentation et de réflexion.

7. Cadres de réunion : mieux décider, en conscience

Clarifier les attentes :
- Pourquoi cette réunion ?
- Que veut-on produire ? Informer, arbitrer, débattre ?
- Qui a quelle responsabilité ?

Expliciter les décisions attendues :
- Quelle décision doit sortir d’ici ?
- Comment allons-nous décider ? Par vote ? Par arbitrage ?
- Quels sont les critères de réussite ?

Distinguer deux formes d’adhésion :
- Consensus : Tous adhèrent à la décision et s’y engagent.
- Acceptation : Certains ne sont pas convaincus, mais s’engagent loyalement.

8. Leviers accessibles à toute équipe

Pratiques simples :
- Recueillir la note d’étonnement d’un nouvel entrant.
- Tour de parole libre sur ce qui reste flou.
- Nommer un signal faible avec tact.
- Atelier symbolique : comment on se parle ici ?
- Partager une contradiction personnelle dans un cadre sécurisé.

9. Comment mesurer l’impact du décodage des non-dits

Indicateurs qualitatifs :
- Décisions plus fluides et assumées.
- Moins de résistance passive, plus d’initiative.
- Désaccords exprimés plutôt que ruminés.
- Responsabilités explicites.
- Capacité accrue à gérer l’incertitude.
- Meilleure valorisation des signaux faibles.

Conclusion

Décoder les non-dits, ce n’est pas viser la transparence parfaite. C’est accepter qu’il y a toujours des angles morts… mais qu’ils peuvent devenir des leviers d’intelligence collective. C’est choisir de faire de la parole, du silence et de l’observation non des pièges, mais des ressources.

Cela n’exclut pas la nécessité de gérer certains silences. Toute information ne doit pas forcément circuler partout, tout le temps. La maturité collective consiste justement à faire la distinction entre ce qui mérite d’être partagé, et ce qui, pour des raisons de clarté, de rythme ou de sécurité, peut être retenu — mais assumé.

Ce que l’on se dit, ce que l’on tait, mais aussi ce que l’on transmet, à qui, pourquoi, et comment, dessine en creux la maturité stratégique d’un collectif.

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Delphine Macquet - Fondatrice CrossRoads

Delphine Macquet

Sa conviction : les enjeux les plus critiques d’une organisation ne relèvent pas uniquement de la stratégie ou des process, ils se jouent dans les interstices, là où posture, perception, pouvoir et relation s'entrelacent.

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